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jeudi 22 septembre 2011

Dernières pensées.

Ô Seigneur, je me tourne vers toi et je ne sais même pas pourquoi. Depuis ma naissance, des tas de gens ont essayé de me faire croire en toi. Je n'y suis pas arrivé, et encore moins depuis que les hommes m'ont enfermé dans cette geôle. Je t'ai appelé, je t'ai supplié, je t'ai pleuré, pourtant tu ne m'es jamais apparu. Il faut avoir la Foi, peut-être, je ne sais pas.

Dans quelques heures, mes bourreaux ouvriront la porte et m'emmèneront pour m'exécuter. Il paraît que je le mérite. La société, les juges, l'humanité m'a condamné. La seule solution pour une sale bête comme moi ne pouvait être que la peine de mort. Mais Toi qui connais le plus profond de mon coeur, Toi Seigneur, le penses tu aussi?

Toi qui as créé la Vie, toi qui as créé l'Homme, l'as tu fait pour qu'il puisse détruire ton œuvre? Penses-tu Seigneur, qu'ils ont le droit de faire cela? Si jamais tu existes, sache qu'Eux ils le font en ton Nom. Ils vont m'assassiner en te priant, en te glorifiant, en te chantant. Penses-tu que cela me donne envie de croire en Toi?

J'aurais tellement aimé qu'ils m'oublient encore un peu, que je vieillisse encore de quelques années. Je me suis habitué à ma cave, malgré sa froideur, malgré ses barreaux. J'aurais voulu encore en profiter, mais bientôt, quelqu'un d'autre prendra ma place. Parce qu'Ils en ont besoin, parce qu'Ils doivent continuer leurs homicides.

Ils me proposent un dernier repas. À quoi bon? Je n'aurai même pas l'occasion de le déféquer. Pourtant, l'envie me démange de leur chier à la gueule, de creuser un trou, de les mettre au fond et de me vider sur Eux et sur leur Injustice. Mais cela serait un péché, non? C'est cela que Tu nous apprends dans la Bible, non? Ce qui est Bien ou Mal.

J'entends la clé de la cellule qui vient de s'insérer. Ils sont là. Les Justiciers vont m'emmener. Ils m'enchaînent une dernière fois, de peur que j'échappe à mon sort. Ils ne ricanent pas, comme je l'aurais espéré. J'aurais tellement préféré qu'ils me haïssent, mais cela fait vingt ans que nous nous connaissons, et ils savent qui je suis.

Ils me parlent, mais je n'ai rien à leur dire. Je veux penser à autre chose, je veux m'évader par l'esprit. C'est tout ce qu'il me reste : la pensée. Ils ont même eu la délicatesse de faire venir un prêtre. Il récite tes paroles. J'ai envie de me retourner et de lui hurler «Ferme ta gueule! Tais toi! Arrête de prêcher le Pardon, alors que c'est toi qui massacres, qui tues!».

Je ferme les yeux et me laisse guider par mes tortionnaires. Je pense une dernière fois à tout ce qui peut me faire croire en Toi. Je m'imagine en haut des montagnes, sur les cimes en train d'observer les aigles. Je me vois voguant sur les mers à bord d'un voilier, je me vois me promener dans les forêts. Si je n'entendais pas le cliquetis de mes fers, je pourrais oublier que je vais mourir.

J'aurais aimé jouer Chopin une dernière fois. Rien que quelques notes de sa nocturne n°1 pour piano. J'aurais voulu encore une fois ressentir l'ivoire du clavier sous mes doigts, juste une fois. Faire rebondir mes phalanges sur un instrument et me laisser bercer par la douceur de la musique. Et recevoir l'aiguille dans mon bras ensuite. Si do ré la si sol...

Ils m'ont bien attaché, à la table. Je suis incapable de bouger. L'infirmier vient d'introduire sa pointe dans mon bras sans même me regarder. A-t-il mauvaise conscience? Je ne veux même pas y songer. Ils ont fermé les rideaux, le public, venu en nombre, ne me voit plus. Il me reste quelques instants, et je veux me remémorer les belles choses de la Vie.

J'aurais encore préféré être piqué par un vétérinaire. Même les chiens ont droit à plus de compassion dans leur agonie. Ils sont couchés sur les jambes de leur maître qui les caresse. J'aurais tellement voulu que quelqu'un me prenne sur ses genoux. Peu importe qui. Simplement poser ma tête, et sentir un être, une présence, juste de l'humanité.

Si tu existes, Seigneur, donne de la force à ceux qui ne m'ont pas pardonné. Si tu existes, Seigneur, donne de l'énergie à tous ceux qui m'ont aidé. Si tu existes, Seigneur, donne la Foi à celui qui m'a condamné. Si tu existes, Seigneur, pardonne à celui qui m'a dénoncé. Si tu existes, Seigneur, aie pitié de ceux qui ont faussement témoigné.

Si tu existes, Seigneur, attends moi, j'arrive.

mercredi 21 septembre 2011

Au bénéfice du doute?

Aujourd'hui, il y aura peut-être un innocent qui va se faire exécuter. Je ne parle pas d'un condamné à mort dans une dictature quelconque ou dans un pays où règne un régime de terreur. Non, je parle d'un être humain américain qui a été jugé coupable dans la société qui se veut la plus grande démocratie du monde. Seulement voilà, il est peut-être innocent.

Cela ne fait aucun doute.

Le doute, justement, ce fameux doute raisonnable doit profiter à l'accusé. Quoiqu'il arrive, c'est la base fondamentale, le pilier du droit dans une civilisation qui se veut juste. Personne ne peut et ne veut remettre en question ce grand pas en avant. Lors du verdict de culpabilité, il faut être absolument certain que c'est bien le cas.

Cela ne fait aucun doute.

L'accusé est noir. Le policier est blanc. L'arme du crime n'a pas été retrouvée. Aucune empreinte digitale n'a été relevée, l'A.D.N. non plus d'ailleurs. Sur les dix témoins qui ont comparu durant le procès, sept se sont récusés et ont parlé de pression exercée par les policiers. Deux d'entre-eux ont même désigné un autre coupable.

Cela ne fait aucun doute.

La fonction des tribunaux est de rendre un jugement, de faire justice ou de trouver un arrangement entre les parties. Cela dans le but ultime de faire la paix. Les hommes se réunissent pour être certain que la société dans laquelle ils vivent peut revenir à la quiétude. L'ambition de la Cour est d'être équilibrée, égalitaire, juste.

Cela ne fait aucun doute.

La loi divine, la loi du talion, les épisodes du type du vase de Soissons ou encore les exécutions par représailles sont utilisées par des sociétés qui n'ont pas encore atteint la maturité démocratique ou par temps de guerre. C'est-à-dire, des communautés qui ne vivent pas en paix avec elles-mêmes ou avec les autres.

Cela ne fait aucun doute.

Le sexe, la couleur de la peau, la situation financière ou sociale d'un individu ne peuvent pas lui être défavorable lors de son procès. Quoiqu'il arrive, le pouvoir judiciaire doit défendre cela depuis l'écriture de la constitution jusqu'au plus simple jugement rendu qui fera jurisprudence. Tous les moyens législatifs doivent servir cette cause.

Cela ne fait aucun doute.

Le policier a été tué dans l'exercice de ses fonctions. Sa famille est détruite et est victime d'un acte de barbarie. Ses deux enfant ont grandi sans connaître leur père. Que leur enfance ait été volée et que ce traumatisme soit indigne, que ce drame se soit abattu sur eux dans la plus parfaite absurdité, et que le crime doive être puni,

cela ne fait aucun doute.

Mais tuer un être humain, ça ne le ramènera pas un autre à la vie. Punir légalement par la peine de mort un criminel, même coupable du crime le plus odieux, c'est s'abaisser à sa férocité. Prendre une vie pour soi-disant rééquilibrer le malheur, c'est moyen-âgeux. Ce n'est plus une famille qui est en deuil, mais c'est cette même famille qui veut que l'autre ait au moins aussi mal qu'elle. Cela s'appelle de la vengeance, pas de la justice.

Et je n'ai aucun doute là dessus.

Que dans une société qui a pratiqué la ségrégation, que dans une société où le risque d'être condamné à mort est jusqu'à onze fois plus grand si le condamné est noir et que la victime est blanche, que dans une société où la parole d'un richissime blanc vaut plus que celle d'une femme de ménage noire,... Que dans cette société-là, Troy Davis ait eu droit un procès équitable?

Là, j'ai un doute. Un gros doute. Ce doute va bien au-delà du raisonnable.

[Le 24 septembre 2011, j'ai lu ceci : Troy devait mourir et bien que je sois toujours contre la peine de mort, cela m'a fait réfléchir au procès équitable ou non]

Et on démarre une autre histoire....

Une page se tourne aujourd'hui avec la fin de mon blog en cet endroit. En effet, j'ai décidé de ne plus l'alimenter à cette adr...